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Manque d’intuition

On surestime souvent la faculté d'empathie des personnes avec autisme, surtout quand elles ont un bon niveau intellectuel. Dans une situation de test, il arrive souvent qu'elles donnent les bonnes réponses aux questions qui sondent la théorie de l'esprit ou la prise de perspective. Cela ne signifie cependant pas qu'elles sont capables de se mettre à la place de l'autre dans des situations plus réelles. Une carte géographique d'une région et la région elle-même sont deux choses différentes.


Il y a souvent un monde de différence entre théorie et réalité. Lors d'un cours de compétences sociales, les participants peuvent comprendre l'explication théorique, mais dans la pratique, cela peut encore mal se passer. Comment se fait-il que ça ne marche pas dans la vraie vie ?

Avant tout, les personnes avec autisme ne semblent pas toujours porter leur attention spontanément sur ce qui est important sur le plan social et émotionnel. Elles remarqueront que vous portez une autre paire de lunettes, mais ne verront probablement pas que vous n'êtes pas très heureux aujourd'hui.

La seconde raison est que, chez ces personnes, l'empathie n'est pas toujours activée spontanément en fonction du contexte. C'est comme si une autre personne devait appuyer sur le bouton de l'empathie. Nous voyons souvent qu'elles réagissent avec empathie quand on le leur suggère. Elles ne sont pas insensibles, c'est juste qu'elles ne savent pas très bien quand elles doivent réagir de manière instinctive. Elles arrivent uniquement à se mettre à la place de l'autre quand une autre personne leur indique la bonne information ou quand le contexte d'interprétation est évident. Dès lors, la prise de perspective doit être apprise ou clarifiée de l'extérieur.

Cet échec peut s'expliquer par une troisième raison. Les personnes avec autisme ont besoin d'un temps de réflexion assez conséquent pour se mettre à la place de quelqu'un d'autre. Dans la vraie vie, ce temps de réflexion n'existe pas. La vie n'est pas une bande vidéo qu'on peut mettre sur pause pour aller chercher quelque chose dans son encyclopédie des scénarios ou dans son dictionnaire des expressions du visage.

Le manque de capacité d'empathie ne doit pas être ramené à un déficit cognitif, à un manque de connaissances. La plupart de ces personnes avec autisme connaissent bien des termes émotionnels et disposent d'une vaste collection de scénarios. Les connaissances théoriques ne leur font pas défaut. Les problèmes rencontrés dans la compréhension du monde émotionnel sont liés à des difficultés simultanées situées à différents niveaux : l'intégration des compétences communicationnelles (la réaction émotionnelle, le fait d'être attentif aux informations les plus pertinentes, la priorité donnée aux stimuli sociaux) et des compétences intellectuelles.

Pour résumer, il ne s'agit tout simplement pas d'un manque de théorie de l'esprit. Au contraire, vu les efforts que ces personnes fournissent pour ‘examiner rationnellement' la face cachée d'autrui. Elles doivent réfléchir plus intensément aux sentiments des autres alors que les personnes ordinaires le font très rapidement, spontanément et intuitivement. Le traitement automatique des informations sociales et émotionnelles est plus proche de l'intuition et de l'instinct que de la réflexion logique. Les personnes avec autisme, spécialement les plus intelligentes, n'ont pas toutes un manque de théorie de l'esprit mais plutôt un manque d'intuition.